• Voyage au Pays des Merveilles (Takao x Midorima +18 )

    Chapitre 1 : A travers le miroir.

     

    La journée avait été plutôt longue pour le shooter de Shutoku et son numéro 10 qui le suivait comme son ombre où qu’il aille. Les dernières heures de cours venaient à peine de se terminer que les deux coéquipiers rangeaient leurs affaires pour se rendre au gymnase afin de s’entraîner en vue du prochain match qui opposera leur équipe à celle de Tôô.

    Pour avoir déjà fait partie de la même équipe que ce dernier au collège et l’avoir déjà vu jouer en tant que simple spectateur lors du match Kaijô/Tôô, Shintarô savait qu’il ne serait pas aussi facile de battre Aomine sur le parquet sans entraînement intensif au préalable.
    Il devait le reconnaître, même s’il n’aimait pas ça, que le basané avait beaucoup évolué depuis le collège et surtout progressé. A bien y réfléchir, il trouvait même que le numéro 5 de Tôô avait gagné encore plus en puissance et en vitesse dans son jeu de basket…à un tel point que même Kise, connu pour être le Perfect Copy de la GM, n’avait pas pu reproduire complètement la technique du basané.

    Alors oui, même s’il savait que les astres seraient de son côté et qu’il aurait son objet porte-chance du jour avec lui, le vert aux yeux de jade appréhendait grandement ce match sans se rendre compte que Takao lui faisait de grands signes devant le visage pour le faire revenir sur terre.

    -Allô Planète Shin~Chan, vous m’entendez ? Ici Takao en direct de la Terre, on se ré-vei-lle !

    La voix de son coéquipier au regard de faucon le réveilla aussitôt. Midorima remit ses lunettes du bout de ses doigts, sortant de ses sombres pensées, avant de regarder le noir qui haussait un sourcil en croisant les bras.

    -Excuse-moi,Takao. J’étais…
    -…Ailleurs !-compléta le faucon- J’ai remarqué, oui et on devrait aller s’entraîner dès maintenant. Je n’ai pas envie de me coucher ici.

    Le shooter de Shutoku grogna en hochant de la tête en entendant les mots de son numéro 10. Il fallait dire que lui non plus n’avait pas spécialement envie de passer la nuit dans le lycée d’autant plus qu’il était prévu que Takao et lui passent la soirée à son domicile afin de s’avancer dans leurs devoirs pour la semaine. Sachant que cette soirée études risquait sans doute de finir très tard, le numéro 6 de Shutoku avait également proposé à son meneur de passer la nuit chez lui. Proposition que le faucon s’était empressé d’accepter, les invitations au domicile de son coéquipier étant très rares.

    Le vert et son meneur avaient passé près de deux heures et demie à s’entraîner sur le parquet, ne s’accordant aucunes minutes de répit ou quelques rares entre chaque séries d’exercices. La fin de leur entraînement arrivée, Midorima se dirigeait vers les vestiaires, laissant le soin au numéro 10 de ranger le ballon et le matériel emprunté.

    Takao,ne mit pas très longtemps à le rejoindre et se changeait après avoir pris une rapide douche pour se rafraîchir. Il s’habillait en vitesse et sortait des vestiaires tandis que le vert se trouvait encore sous la douche. Le meneur ignorait ce qui pouvait bien arriver à son coéquipier mais il trouvait ce dernier vraiment étrange depuis qu’il avait été le chercher chez lui le matin même. Bien sûr le 10 savait très bien pour le match à venir mais dans ses souvenirs, ça n’avait jamais dérangé ou posé problème outre à mesure au shooter. Alors pourquoi maintenant ?

    Takao poussait un gros soupir exténué alors qu’il venait tout juste d’enfourcher le vélo non sans avoir nonchalamment balancé son sac de sport dans la carriole qui servirait à transporter Midorima une fois de plus.

    D’ailleurs, il trouvait son coéquipier anormalement long aujourd’hui tandis qu’il croisait ses bras sur le guidon avant de poser son menton dans le creux formé. Comme bien souvent depuis qu’il connaît le 6 de Shutoku, le meneur s’apprêtait à servir de taxi encore une fois et ressentait, comme c’était souvent le cas dernièrement, cette envie montante d’envoyer bouler son shooter. Mais comme toujours, Takao savait qu’il ne le ferait pas concrètement et se contenterait simplement de suivre les ordres du vert, en bon esclave qu’il était.

    Quand il y repensait, il se disait qu’il loupait des heures de sommeil juste pour assouvir les bons vouloirs de Môssieur Précieuse alors que ce dernier a largement les moyens de se payer un vrai taxi. Se lever aux aurores pour aller le chercher puis l’emmener s’acheter son objet-porte chance du jour après avoir attendu que Midorima ait écouté jusqu’au bout l’horoscope et seulement se rendre au lycée ensuite …non Takao se disait souvent que ce n’était pas une vie pour lui mais il s’y pliait quand même et se demandait bien pourquoi sans pour autant avoir de réponse à cette question.

    Le meneur sortit de ses pensées lorsqu’un poids se fit sentir dans la carriole attachée derrière lui. Levant la tête, le faucon se retournait pour voir le vert le fixer, sa statuette de Panda en céramique sous le bras et son sac posé à côté de lui.

    -Sérieusement,tu ne peux pas prendre d’objet porte-chance moins lourd, Shin ? On voit bien que ce n’est pas toi qui pédale.
    -Je n’y peux rien si c’est l’objet porte-chance du jour pour les cancers.
    -Je me demande vraiment où tu peux bien ranger tout ça une fois que tu n’en n’as plus l’utilité ? Ça doit ressembler à un vrai bazar, chez toi.
    -Va mourir, Takao ! Et pédale !

    Takao s’était simplement contenté de hausser des épaules en reprenant sa place initiale et en riant doucement en guise de réponse à la dernière pique de Shintarô. C’était plus fort que lui, il ne pouvait s’empêcher de chercher et taquiner le shooter en lui envoyant des petites vannes acerbes auxquelles ce dernier répondait, toujours agacé.

    Mais Kazunari savait que c’était de bonne guerre et puis cela pimentait toujours un peu leurs journées. On pouvait bien le traiter de masochiste mais le faucon s’en fichait : ces petits échanges assassins, il n’y avait qu’avec le vert qu’il pouvait les avoir à l’aise et ça lui donnait une bonne raison de rester aux côtés de ce dernier en plus de son admiration pour lui.

    Cependant,le meneur s’exécutait en soupirant bruyamment et commençait à pédaler rapidement après avoir fait demi-tour. Lorsqu’il s’arrêta à un feu rouge, Takao leva un instant le nez vers le ciel qui commençait à s’assombrir tandis qu’un petit vent se levait.

    *Ça ne sent pas bon et si je ne me dépêche pas, on va se prendre la douche froide.*pensa le faucon en fronçant le nez.

    Le feu passant au vert, Kazunari se remit à pédaler aussi vite que ses jambes pouvaient encore le lui permettre à ce stade de cette fin de journée, secouant un Midorima qui lui grognait de faire attention. Le meneur continuait sa course effrénée alors que les premières gouttes de pluie commençaient à s’abattre sur l’asphalte et sur leurs vêtements à eux deux.

    Dans le ciel, les nuages noirs continuaient de s’amonceler et déjà, au loin, on pouvait entendre les premiers coups sourds de tonnerre retentir. Une tempête se préparait, c’était du moins ce que pensaient Takao et Shintarô en arrivant au bas de l’immeuble de luxe dans lequel vivait le shooter de Shutoku quand le petit vent se transforma aussitôt en bourrasques. Les gouttes d’eau se firent alors de plus en plus grosses et chutèrent de manière plus régulière,commençant à bien tremper les deux basketteurs qui se hâtèrent de se mettre à l’abri après avoir garé le vélo pousse-pousse.

    Alors qu’ils venaient de franchir la porte du hall d’entrée qui se referma sur eux,le faucon alla coller son nez à la vitre pour regarder le ciel qui passait petit à petit du gris au noir total.

    -C’était moins une, hein Shin~Chan ?
    -Presque moins une, Bakao. Pour ta gouverne, nous sommes quand même trempés même si ce n’est pas au stade de la douche. Tu aurais pu aller encore plus vite.
    -Tu aurais des objets porte-chance moins lourds et encombrants, c’est sûr que je pédalerais encore plus vite, Shin~Chan.

    Le noir aux yeux bleu-gris n’avait pas décollé de la vitre en répondant au vert qui refermait sa boîte aux lettres après avoir récupéré son courrier. Ce dernier remonta une nouvelle fois ses lunettes de son majeur droit avant de dire à son meneur de le suivre. Le faucon, mit une main dans sa poche pendant que celle qui tenait son sac se posait sur son épaule. Il suivait son coéquipier tout en regardant autour de lui, admirant la déco comme si c’était la première fois qu’il venait.

    -Quel …luxe !Je crois que j’arriverais jamais à m’y faire.
    -Que veux-tu ! Nous n’avons pas les mêmes valeurs toi et moi, mon cher Takao.
    -C’est sûr. Mais, au moins, je me dis que le plus à plaindre de nous deux, c’est quand même toi Shin~Chan.
    -Tiens donc et tu pourrais me dire ce qui te fait penser ça ?

    Takao ricana tandis que le vert appelait l’ascenseur. Alors qu’ils attendaient que ce dernier arrive, le faucon s’adossait au mur en fixant le shooter, un sourire en coin aux lèvres.

    -Disons juste qu’étant donné que, moi, je ne viens pas d’une bonne famille, je serais libre de choisir d’épouser qui je veux. Contrairement à toi qui te verra t’imposer une prétendante contre ton gré et ce, quelques soient tes protestations.

    La sonnette de l’ascenseur retentit tandis que les portes s’ouvrirent. En soupirant, Midorima s’engouffrait dans la cabine, suivit de son 10 qui s’adossait à l’une des parois. Le vert appuya sur la touche 6 et se retourna vers Takao en croisant les bras.

    -Tu m’as l’air très bien renseigné sur le sujet pour quelqu’un venant d’un milieu modeste.
    -Oui et je trouve ça d’un triste pour toi, mon pauvre. T’as beau être d’une famille friquée, je préfère quand même ma condition à la tienne, Shin~Chan.
    -Ça ne me touche même pas…je n’aime pas les filles de toutes façons : je les trouve insignifiantes et superficielles. Donc, pour moi la question du mariage forcé est réglée.

    Ces derniers mots avaient littéralement écorché la bouche du 6 de Shutoku qui n’aimait pas spécialement évoquer son orientation sexuelle et surtout le sujet du mariage d’intérêt des bonnes familles telles que la sienne. Kazunari était même l’une des très rares personnes avec qui il pouvait se permettre d’aborder le sujet quand son bon vouloir le lui autorisait. Si Shintarô en rougissait en grinçant des dents alors qu’ils quittèrent tous les deux l’ascenseur qui venait d’arriver à l’étage, le faucon, lui en riait doucement en disant qu’il trouvait ça presque mignon venant de la part son partenaire de parquet.

    Alors que le vert ouvrait la porte de son appartement, le meneur ne pouvait s’empêcher de le taquiner une fois de plus…

    -Tu me dis ça, à moi, d’accord. Mais comment tu vas l’annoncer à tes parents ?
    -Je n’y suis pas encore et j’y réfléchirais le moment venu. J’ai autre chose à penser que ce genre de stupidité, en ce moment.
    -Comme le match contre l’équipe d’Aomine… ?

    Shintarô se redressa après avoir ouvert la porte et regarda le meneur de son équipe qui le fixait, adossé au mur, en attendant une réponse. Le vert se contenta de grogner tout en se décalant pour laisser le passage de libre au faucon qui se contenta simplement de jeter, avec nonchalance, son sac de sport sur son épaule.

    -Je veux une réponse, Shin. Pourquoi ce match te tracasse autant alors qu’habituellement tu t’en fiches royalement ? Pourquoi maintenant ?
    -C’est compliqué. Maintenant si tu pouvais entrer, parce que je ne vais pas non plus rester éternellement sur le palier de la porte à attendre que tu te décides.
    -Je me contenterais pas d’une réponse aussi vague, Shin~Chan.

    Sur ces dernières paroles, Takao s’exécuta et passa l’entrée, non sans avoir fixé un Midorima qui remontait, une fois de plus de son majeur droit, ses lunettes avant de le talonner et de refermer la porte à clef.

    -T’as l’intention de me séquestrer pour me violer ou quoi, Shin~Chan ?
    -Décidément,tu passes ton temps à me dire des bêtises plus grosses que toi, Takao.

    Le noir aux yeux bleus gris rit, amusé de la réaction de son coéquipier alors qu’il se rendait dans le salon pour y déposer ses affaires. Il savait très bien qu’il dormirait dans la chambre du shooter mais ne se permettait pas de s’y aventurer sans l’autorisation de ce dernier…car en plus d’être une véritable précieuse, Môssieur se trouvait également être un gros maniaque du rangement qui ne supportait pas le désordre dans toutes ses formes. Il attendit que le vert aux yeux de jade vienne le rejoindre devant le canapé et quand ce dernier l’y autorisa, Kazunari prit place en soupirant de soulagement.

    -Eh bien, il venait du fond du cœur ce gros soupir.


    Le 10 se contenta seulement de regarder le 6 pour toute réponse à la remarque de ce dernier.

    Sur ce coup-là, il le trouvait vraiment gonflé de lui tenir ces propos d’autant plus que ce n’était pas lui qui avait toujours les jambes en compote en fin de journée…même si les heures de vélo quotidiennes aidaient pas mal à l’entretien musculaire de ces dernières.

    Le faucon se pencha pour se saisir de son sac à dos qu’il ouvrit pour en sortir son agenda. Et alors qu’il était en train de le consulter pour savoir quoi faire, Shintarô sortait ses affaires et le regarda du coin de l’œil…

    -On a un exercice de mathématiques, un résumé d’histoire à faire et un chapitre d’anglais à lire et à résumer. Une fois qu’on aura fait tout ça, on pourra se détendre devant un film et je te laisserais choisir pour ce soir.
    -Hm je comprends mieux pourquoi il y a une tempête dehors. Vu la carrière professionnelle que tu vises, je pensais encore te voir le nez plongé dans tes bouquins, une fois les devoirs terminés. J’ai toujours essayé de t’imaginer entrain de regarder un film, mais je n’y suis jamais parvenu.
    -Très drôle. Tu devrais me remercier au lieu de déblatérer n’importe quoi ! Je cherche juste à te faire plaisir pour une fois – rétorqua Midorima en grognant avant d’ajouter avec un sourire en coin- …pour te remercier de tous les efforts que tu fournis chaque jour en venant me chercher et en me déposant au bas de l’immeuble chaque soir avant de rentrer chez toi .
    -Dans ce cas, tu devrais me remercier bien plus souvent, Shin~Chan. Ceci dit, j’apprécie beaucoup ta petite attention. Je trouve ça très touchant de ta part, mais la prochaine fois, je demanderais plus.
    -Tu veux quoi ? Coucher avec moi ?
    -C’est une suggestion très intéressante, Shin. Laisse-moi la noter dans mon agenda.
    -On verra si tu le mérites vraiment…- répondit Shintarô en remontant une nouvelle fois ses lunettes avant de se saisir de son livre de mathématiques- En attendant, commençons à travailler ou nous serons jamais prêts de voir ce film.

    Takao haussa un sourcil à la dernière réponse de son shooter : certes, il n’avait pas dit pas oui mais ne semblait pas non plus contre l’idée de coucher avec le faucon. Le meneur enregistra ce détail dans un coin de sa mémoire tout en imitant son coéquipier et en ouvrant son classeur de mathématiques.

    Les deux comparses entamèrent leurs devoirs dans le plus grand silence et seuls les bruits des bourrasques qui soufflaient au dehors et les gouttes de pluie qui martelaient les carreaux perturbaient le calme qu’avaient instauré les deux lycéens. Le tonnerre gronda une fois de plus, mais plus fort cette fois-ci tandis que les éclairs et la foudre commençaient leurs ballets dans le ciel noir, faisant relever le nez de Kazunari qui essayait de se concentrer sur son devoir.

    Non pas que le faucon avait peur de l’orage, mais il n’était pas très friand non plus de ce genre de tempête. Intérieurement, il remerciait le shooter de lui avoir ouvert le local à vélo de l’immeuble afin qu’il y gare son pousse-pousse.Au moins, il ne risquerait pas d’être emporté par la tempête si celle-ci perdurait et se révélait trop forte par la suite. Shintarô, remarqua le comportement de son numéro 10 et ricana.


    -On a peur de l’orage ?
    -Non, pas spécialement mais j’étais en train de te remercier intérieurement de m’avoir ouvert le local à vélos pour y garer le pousse-pousse. Au moins, il ne court aucuns risques si la tempête ne s’arrête pas et qu’elle devient trop violente.
    -C’est effectivement très mal parti pour que ça s’arrête. On devrait fermer tous les volets tout de suite et nous barricader. On regardera ce qu’il se dira aux infos ensuite sur ce sujet. Si ça se trouve, nous ne serons même pas en mesure de nous rendre en cours et à l’entraînement demain, ni les autres jours.
    -Et les devoirs ?
    -On continuera quand même de nous avancer dedans. Ce sera toujours ça de fait même si nous n’allons pas en cours à cause de la tempête.

    Le 6 de Shutoku se leva et se dirigea vers les fenêtres du salon dont il actionna les volets roulants par l’intermédiaire d’un bouton situé sur le mur à côté de lui. Aussitôt l’obscurité se fit dans toutes les pièces tandis que le faucon allumait les lumières. Une fois fait, tous deux revinrent sur le canapé et Midorima prit la télécommande pour allumer la télé, le temps de consulter la chaîne météo qui annonça un bulletin d’alerte pour la nuit et les jours à venir.

    Comme il l’avait dit au meneur, la tempête ne s’arrêterait pas dans l’immédiat et prendrait même plus d’ampleur dans le cours de la nuit ainsi que dans les jours suivants. De ce fait, tous les établissements scolaires, gymnases, tous les commerces seraient portes closes et les habitants de la ville étaient tenus de rester confinés chez eux, le temps que la tempête passe.

    - C’est bien ce que je craignais : nous n’irons pas en cours d’ici peu. Il nous faudra attendre et pour un peu que le lycée devienne une victime de cette catastrophe naturelle, ce ne sera pas encore maintenant qu’on retournera sur les bancs. Tu devrais appeler tes parents tant que tu as encore du réseau pour les prévenir que tu resteras ici le temps que la tempête se calme.

    Takao hocha de la tête et fouilla dans son sac, à la recherche de son téléphone portable dont il finit par se saisir avant de composer le numéro du domicile familial. Au bout de quelques secondes d’attente, la voix de sa mère si fit entendre à l’autre bout du fil. Au vu des bruits de fritures qu’il pouvait entendre le temps de sa brève conversation avec elle, Kazunari se doutait que la tempête commençait à gagner en intensité et qu’il ne serait, juste, qu’une question de minutes avant que sa communication ne soit coupée. Après quelques grésillements et des au revoir hachés, le faucon entendit la tonalité typique d’une ligne occupée. En regardant l’écran de son smartphone, le meneur de Shutoku constata que sa ligne était à présent limitée pour les appels d’urgence et ses barres de réseau commençaient à faiblir sérieusement.

    En soupirant il reposa son téléphone sur la table basse et bailla à s’en décrocher la mâchoire sous le regard de jade de Shintarô qui se dirigeait vers la cuisine pour faire l’inventaire des vivres alimentaires. Se massant la nuque, le faucon le rejoignit et le regarda faire, les mains dans les poches.

    -Tu penses qu’il y aura assez pour deux et pour plusieurs jours, Shin, niveau bouffe ?
    -Oui et de toutes façon mes parents ont fait construire une pièce où ils ont stocké des réserves de nourriture en prévision de ce genre de situation. Nous n’avons pas à nous inquiéter de ce côté-là –dit le vert en se redressant et en remontant ses lunettes avant d’ajouter- …ce n’est pas comme si j’avais l’autre goinfre de crapaud avec moi.
    -Tant d’amour entre toi et Kagami, ça fait plaisir à voir.
    -Tais-toi espèce de crétin ! Montre-toi intelligent en cessant de raconter toujours n’importe quoi !
    -Il n’y a que la vérité qui blesse.
    -TAKAOOOOOOOOOOOO !!!!

    Il n’en fallut pas plus au faucon pour partir en explosant de rire vers la salle à manger pour s’asseoir de nouveau sur le canapé et tenter de se concentrer de nouveau sur son exercice de mathématiques. En le voyant faire, Midorima ne put s’empêcher de ricaner doucement.

    -Il faut croire que tu sais te montrer plus sérieux et plus intelligent quand tu t’y mets, mon cher Takao.

    Pour toute réponse à la provocation du vert, le 10 de Shutoku se leva et se planta devant ce dernier. Il le regarda en commençant à pouffer de rire puis tendit une main pour se saisir des lunettes d’un Shintarô stoïque qui ne pouvait s’empêcher de grogner…tout en se laissant faire. Takao les chaussa sur son propre nez en souriant en coin, puis le fixa en approchant son majeur droit du milieu de la monture avant d’imiter la voix de son coéquipier…

    -Takao sois sérieux voyons ou tu ne mériteras jamais de coucher avec moi, nanodayo ! dit le meneur en remontant les lunettes de son majeur droit.
    -Takaooo !! Je t’aie déjà dit d’arrêter de m’imiter comme ça !!!

    Nouveau fou rire de la part du noir au regard de faucon alors qu’il enlevait les lunettes dans l’intention de les replacer sur le nez du vert aux yeux de jade. Kazunari s’arrêta alors dans son élan pour fixer son shooter droit dans les yeux. Midorima grogna en lui demandant ce qu’il pouvait bien avoir à le fixer ainsi et le faucon se mit à sourire

    -Tu es vraiment sexy sans lunettes, Shin~Chan. Tu devrais sérieusement songer aux lentilles de vue au lieu de ces lunettes.
    -Ça ne m’intéresse pas et je me porte très bien comme ça ! Maintenant je te prie de me rendre mes lunettes immédiatement, Bakao !

    Le meneur se contenta de rire tout en remettant les lunettes sur le nez de son shooter puis les remonte avant de se remettre à faire ses devoirs tout en se frottant les yeux et en réprimant un nouveau bâillement. Shintarô lui conseilla alors d’aller se passer un peu d’eau froide sur le visage pour se réveiller tout en lui indiquant la salle de bain. Kazunari hocha de la tête tout en baillant et se dirigea vers la salle de bain.
    De son côté, Shintarô entreprit de préparer une thermos de thé en prévision de la longue soirée qui s’annonçait. Devant son coéquipier, il ne le faisait jamais,mais il reconnaissait qu’il abusait vraiment de son autorité avec ce dernier. D’ailleurs,il ne comptait même plus toutes les fois où le faucon le traite d’esclavagiste et râle lorsqu’il lui demande de pédaler pour lui. Si devant les autres, le shooter dit tout le temps qu’il ne fait que ménager son coéquipier pour le maintenir en forme pour l’emmener où il le souhaite, la réalité en est tout autre…mais il se garde bien de le montrer à qui que ce soit, pas même à Takao.

    Certes,il est vrai que devant tous, le vert garde son masque stoïque et impassible,passant son temps à railler son numéro 10 mais sa fierté l’empêche de montrer ses réels sentiments vis-à-vis de ce dernier.
    En dépit des apparences, Midorima apprécie grandement la présence et la compagnie de Kazunari que ce soit sur le parquet ou tout bonnement dans les moments les plus simples comme celui-ci.Mais il a une réputation à tenir, alors il ne le montre pas toujours et l’éducation de bonne famille qu’il a reçu ne l’aide pas non plus dans cette voie.

    Takao venait tout juste de finir de se passer de l’eau en se donnant deux bonnes claques bien cinglantes sur la figure. Une fois bien réveillé, il rangea la serviette et passa un coup d’éponge sur le rebord du lavabo avant de sortir. Il retourna dans le salon avec toujours cette question obsédante dans la tête : où Midorima pouvait bien-t-il ranger tous ses objets porte-chance une fois utilisés ?

    Observant Shintarô en silence, il finit par repérer une trappe au plafond située au bout du couloir qui menait à la salle de bain. Il longea ce dernier sans un bruit avant de se saisir d’une chaise sur laquelle il monta puis tendit le bras vers le haut. Takao attrapa la poignée de la trappe dont il baissa le battant avant de descendre l’échelle. Il gravit cette dernière et se retrouve dans un grenier parmi tous les vieux objets que Shintarô ont entreposés.

    Contrairement à ce à quoi il s’attendait, le faucon constata que très peu d’objets familiaux figuraient dans la pièce. En revanche, quelques cartons remplis d’objets en tous genres trônaient à côté d’un immense miroir recouvert d’une bâche en tissu. Un sourire s’esquissa alors sur les lèvres de Kazunari qui commença à fouiller dans les cartons. Pourtant, il était certain que tous les objets récents qu’avait achetés Midorima en sa compagnie n’étaient pas là. Il commençait à soupçonner ce dernier de les cacher dans sa chambre mais se gardait bien de lui poser la question.

    Au moment où le 10 de Shutoku allait se saisir d’un ancien objet porte-chance de son shooter, le miroir se mit à émettre une forte lueur. Pensant sans doute que son cerveau lui jouait des tours ou se pensant victime d’une hallucination dûe à son état de fatigue, Takao se frotta les yeux avant de regarder de nouveau en direction du miroir. Le faucon voulait en avoir le cœur net, alors d’un geste ample et souple de la main, il débarrassa l’objet de sa bâche poussiéreuse en tissu et le regarda avec de grands yeux.

    Lorsque le meneur s’approcha pour regarder le miroir de plus près, il recula la tête en voyant une image autre que son propre reflet se former. Le reflet se flouta pour laisser apparaître un visage familier affublé d’oreilles de lapin blanc…

    -Kise ?C’est toi ? Délire ! C’est quoi ces oreilles de lapin?

    Le reflet se contenta de sourire en secouant négativement de la tête puis montra une montre dont il tapota le cadrant du bout du doigt. Le reflet de Kise aux oreilles de lapin regarda ensuite vers le sol du grenier puis releva les yeux vers un Takao qui partit, complètement surexcité, chercher Shintarô.
    Ce dernier dévala les marches de l’escalier amovible en courant et se précipita dans la cuisine d’où le shooter sortait chargé d’un plateau sur lequel trônaient deux tasses, le sucrier et une théière fumante. Le faucon manqua de percuter son coéquipier tant il arrivait vite et glissait sur le parquet du salon. En le voyant débouler, Midorima eut le réflexe de lever le plateau d’une main pour la placer au-dessus de sa tête en grognant.

    -Tu peux m’expliquer ton agitation, Takao ?! Un peu plus et tu me faisais renverser le plateau, espèce de crétin notoire !
    -Shin~Chan !Il faut que tu voies ça tout de suite ! C’est hallucinant, je viens devoir la tronche de ton pote blond de Kaijô avec des oreilles de lapin dans le miroir du grenier !!

    Shintarô posa le plateau sur la table basse du salon et remonta ses lunettes de son majeur droit tout en poussant un gros soupir alors qu’il servait les tasses.

    -Comme toujours, Bakao, tu me racontes n’importe quoi ! Kise avec des oreilles de lapin… Vraiment tu ne sais plus quoi inventer pour attirer mon attention.Bientôt tu vas me sortir que c’est lui qui t’a demandé de venir me chercher,c’est bien ça ?!
    -Pas de vive voix mais oui c’est ce qu’il a fait.
    -Arrête tes bêtises, ce n’est vraiment pas drôle ! Et puis je croyais que tu devais juste aller te passer de l’eau sur le visage pour te réveiller. Alors tu peux m’expliquer ce que tu fabriquais dans le grenier ?

    Takao le regarda un instant sans répondre puis haussa des épaules en soupirant

    -Trouver une réponse à une question que je t’avais posée durant le trajet. Mais comme tu refuses obstinément de me parler, il fallait bien que je voie par moi-même. On va dire que j’ai eu à moitié ma réponse. Bon est-ce que tu vas me suivre ou non ?!
    -Ne sois pas absurde ! Un miroir est juste un objet fait pour te refléter et pas pour y voir je ne sais quelle apparition, fruit de ton imagination débordante,Bakao !

    Devant l’air stoïque qu’affichait le shooter, le faucon n’eut pas d’autre choix que de prendre le vert par le poignet pour le traîner derrière lui. Shintarô protesta tout le long du couloir et la montée des marches mais suivit tout de même Kazunari dans le grenier. Arrivés devant le grand miroir, le 10 de Shutoku montra le visage aux oreilles de lapin blanc au numéro 6.

    -Alors,Shin ? Tu es toujours persuadé que j’ai une imagination débordante et que ce visage est dû à mon état de fatigue ?

    En voyant que le visage, dans le miroir, décrit par le faucon était bien réel,Midorima commença par retirer ses lunettes pour les nettoyer avant de les remettre. Au final, le shooter dut se rendre à l’évidence que Takao ne lui avait pas raconté n’importe quoi…pour une fois.

    -Bon très bien. Même si je n’aime pas ça, je dois reconnaître que, pour une fois, tu ne m’as pas raconté d’histoire. Soit, ce visage que tu m’as décrit est bien réel et après ? Que veux-tu que je te dise de plus ?

    Takao allait répondre quand le visage s’éloigna un peu en leur tendant silencieusement la main. Bientôt des cercles, semblables à ceux que l’on peut voir à la surface d’une étendue d’eau après avoir jeté une pierre dedans, se formèrent dans le miroir et une sorte de passage apparut.

    Le faucon fut le premier à être happé et aspiré par le trou sous le regard d’un Midorima à la fois surpris et effaré. Le vert tendit les bras pour tenter de retenir son coéquipier, prenant bien appui sur ses pieds. Mais la force d’aspiration fut telle que Kazunari fut entraîné en arrière et le shooter irrémédiablement attiré vers le miroir, les semelles de ses chaussons crissant sur le parquet et laissant des traces de gomme. Le 6 de Shutoku avait beau lutté de toutes ses forces, elles furent bien vaines car il disparut dans le trou tout juste derrière son meneur.

    Lors de leur chute, les deux joueurs de Shutoku furent surpris de voir que les parois du mur étaient faites de terre fraîche. Très vite, ils firent le lien avec le lapin-Kise qui avait déjà atterrit et toquait une fois de plus contre le cadran de sa montre…

    -Non mais je rêve ou il nous dit de nous dépêcher ?!
    -Généralement quand une personne tapote le cadran d’une montre, c’est pour te dire de te bouger, Shin !
    -Ne me prends pas pour un idiot, Takao !
    -Loin de moi cette idée mais reconnais que ta question était, ELLE, idiote !
    -Va mourir, crét…AAAAHHH !!!

    Le vert n’eut pas le temps d’en rajouter plus que la chute se fit de plus en plus rapide tout comme celle de son faucon. Autour d’eux flottaient des objets et des meubles divers et variés tels que des livres, des tables, un piano, des tableaux ou encore des crayons, des manuels scolaires. Bientôt ces objets du quotidien firent place à d’autres propres au basket : paniers, ballons,tenue.

    Pourtant, alors que leur chute, qui leur semblait interminable, continuait, les deux adolescents ne se rendirent pas comptent que leurs physiques étaient en train de changer. Ils finirent par atterrir au sol dans un bruit sourd l’une à côté de l’autre…
    D’abord sonnées, elles se redressèrent très difficilement en se frottant les tempes puis essayèrent tant bien que mal de regarder le décor autour d’elles qui avait bien changé. Takao se rapprocha de Midorima en se massant l’épaule. Elle jeta un regard circulaire avant de pousser un gros soupir tout en regardant sa comparse du coin de l’œil…

    -On est où, Shin~Chan ?
    -Ça j’aimerais bien le savoir, figure-toi ! Mais… ?

    La verte regarda la noire aux yeux bleus gris et la détailla des pieds à la tête, intriguée et surprise.

    -Ce n’est pas possible, je dois être victime d’hallucinations !

    Takao la regarda incrédule, ne comprenant pas de quoi la shooteuse pouvait bien lui parler. Elle réalisa alors en l’observant de plus près que son corps avait changé. Elle avança un doigt et appuya sur l’une des bosses de la poitrine de sa coéquipière.

    -C’est quoi ça ? On dirait des boobs.
    -Des boobs ?
    -Ouais des seins.

    La verte la regarde avec incompréhension dans un premier temps avant de rougir et se reculer en repoussant la main de la noire aux yeux bleus gris…

    -Bon ça suffit ! J’ai compris alors cesse de me tripoter comme ça, Takao !
    -Tu peux toucher les miens, si tu veux ?
    -Certainement pas ! Tu ne peux pas faire preuve d’un peu plus de retenue ?!
    -Bah pourquoi ?

    Midorima grogna avant de remarquer la silhouette du Lapin Blanc-Kise disparaître derrière l’une des nombreuses portes présentes dans la salle…mais trop vite pour les deux jeunes filles qui n’eurent pas le temps de retenir la porte qui se referma dans un claquement, résonnant dans toute la pièce. Soupirant, la verte remonta ses lunettes une fois de plus de son majeur droit avant de regarder sa meneuse.

    -Parfait ! Ce lapin est parti et nous voilà enfermées dans ce hall aux nombreuses portes ! Tu peux me dire comment on va sortir de là, Takao ?!

    La noire aux yeux de faucon se tenait devant la minuscule porte derrière laquelle le lapin-Kise avait disparu puis s’agenouilla devant l’air dubitatif. Elle observa la serrure en se mettant à quatre pattes puis colla son œil contre le trou pour tenter de regarder de l’autre côté. La verte détourna le regard devant la jupe très courte de sa coéquipière qui remontait, révélant un mini-shorty en dentelle noire et orange au fur et à mesure que celle-ci se penchait…

    -Dis donc, tu pourrais éviter de me donner vue sur ton mini-shorty en dentelle noire et orange ? Viens plutôt m’aider à trouver une solution pour sortir de cette salle.
    -Ça a l’air étrange de l’autre côté de cette porte et en plus ton pote blond aux oreilles de lapin nous nargue encore.
    -Ce n’est PAS mon pote ! Et j’aimerais sortir d’ici alors dépêche-toi de te relever et de m’aider à chercher une solution…si ce n’est pas trop te demander.

    Takao soupira et se releva en prenant soin de s’épousseter les genoux puis remit sa jupe en place tout en se dirigeant vers Midorima qui remontait une fois de plus ses lunettes.

    -C’est étrange…
    -Quoi ?!
    -J’ai toujours cru que tu étais l’une des têtes pensantes de la Génération Miracle avec cet Akashi qui nous en a fait bavé à la Winter Cup. Mais je devais sans doute me tromper…

    La verte aux yeux de jade poussa un gros soupir bruyant qui résonna dans la pièce avant de croiser les bras. Certes, le physique de sa coéquipière avait sans doute changé tout comme le sien, mais il était indéniable que leurs caractères n’avaient pas subis la moindre modification…elle avait même l’impression qu’ils étaient devenus pires.